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SABBAT

Ah ! Ah ! toi aussi, tu te lamentes ? Le beau miracle d’exulter quand frémit, à votre main, la damnée sonore ! Plus de musique, plus d’allégresse, donc ?

Tous, vous confondez la religion et l’exaltation. Si celle-ci vous abandonne, un instant, vos dieux les plus adorés, les plus certains, les plus reconnus ne sont plus, sur le sol, que des cadavres noirs.

Et, cependant, que fais-tu des choses qui t’entourent, de cette terre brune aussi possédée, par le souffle invisible, que les ombelles légères des étoiles ? Que fais-tu de ce doute, même, qui vient de t’effleurer ? Ingrate ! Le doute, c’est le recueillement du rêve, l’ombre ambiguë et profonde qui ne l’enveloppe que pour, tout à coup, le jeter, nu et plus radieux, à sa marche éternelle…

Satan est-il ou n’est-il pas ? Satan, le tien, le poète qui danse au cœur des poètes ?

— Il est.

— Mais, parfois, je vous quitte, chanteurs, et c’est par les plaintes que vous exhalez, alors, que je connais ma puissance sur vos âmes maudites et divines.

Viens, volons ici, là, partout…

Et ris, ma sorcière vivante. —