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Page:Plaute, Térence, Sénèque - Théâtre complet, Nisard.djvu/49

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AMPHITRYON.
SCÈNE II.
MERCURE, seul.

Jusqu’à présent, tout m’a fort bien réussi ; j’ai su écarter de la maison cet importun, de manière que mon père puisse jouir en sûreté des doux effets de sa métamorphose. Ce pauvre diable, lorsque son maître Amphitryon sera arrivé, ne manquera pas de lui raconter qu’un autre Sosie l’a empêché d’entrer au logis ; le maître ne pourra ajouter foi à ce rêve, et croira plutôt que le coquin n’est point parti, et n’a pas suivi ses ordres. Je vais répandre l’erreur et la confusion dans l’esprit de tous deux et dans toute la maison d’Amphitryon. Cela durera jusqu’à ce que mon père soit rassasié d’amour ; alors ils sauront tous la vérité. Jupiter prendra la peine de réconcilier Alcmène avec son époux. Car d’abord Amphitryon, accusant sa femme, fera un vacarme horrible. Mon père trouvera moyen d’apaiser tout le tumulte ; enfin, Alcmène, ce que je ne vous ai pas encore dit, accouchera de deux fils, dont l’un naîtra dix mois, et l’autre sept après sa conception. L’un des deux est d’Amphitryon, l’autre est de Jupiter. L’aîné appartient au moindre des deux pères, et le second, au plus grand. Êtes-vous enfin assez instruits ? C’est pour couvrir l’honneur d’Alcmène que mon père a voulu qu’elle accouchât de deux enfants à la fois ; de manière qu’elle n’eût qu’une seule fois la douleur de l’enfantement, et que l’on ne la soupçonnât point d’une aventure galante. Amphitryon, cependant, sera instruit de la vérité. Que résultera-t-il de cette intrigue ? Après tout, personne n’en fera un crime ni un reproche à cette pauvre femme. Jupiter est trop juste pour permettre que sa faute retombe sur celle qui en est innocente. Mais il faut me taire. J’entends qu’on ouvre, et je vois notre faux Amphitryon sortir avec Alcmène, son épouse d’emprunt.

SCÈNE III.
JUPITER, ALCMÈNE, MERCURE.

Jup. Adieu, ma ehère Alcmène, portez-vous bien ; continuez à prendre soin de la maison ; mais, de grâce, ménagez-vous ; vous voyez que vous êtes presque à terme ; je suis obligé de partir ; je vous recommande notre enfant qui va naître.

Alcm. Qu’avez-vous donc, mon ami, qui vous oblige à vous éloigner sitôt ?

Jup. Ce n’est pas que je ne me trouve bien Ici près de vous ; mais quand un général n’est pas à la tête de son armée, les choses ne vont jamais comme elles doivent aller.

Merc, à part. C’est un adroit fripon, que mon très-cher père ; voyez comme il sait attraper cette pauvre femme par ses cajoleries.

Alcm. En effet, je vois combien vous vous souciez de votre épouse.

Jup. N’est-ce pas assez pour vous, s’il n’y a aucune femme au monde que j’aime autant que vous ?

Merc, à part, montrant le ciel. Si votre femme savait vos fredaines ici-bas, vous aimeriez mieux être Amphitryon que Jupiter.

Alcm. J’aimerais mieux des preuves réelles que des assurances de tendresse en parole. À peine la place que vous occupiez au lit est-elle échauffée, que vous me quittez. Vous êtes arrivé hier fort tard, et vous vous en allez à présent. Trouvez-vous cela fort agréable ?

Merc., à part. Je vais me mêler de l’entretien, et aider mon père à la calmer. (Haut.) Non, je ne