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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/130

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— Amoureux ?… répéta machinalement la petite, entendant ce mot pour la première fois.

Siroco, élevé dans la banlieue de Vienne, savait des tas de choses ; il était d’ailleurs né de cet amour dont il parlait si librement, on l’avait trouvé sur le bord du Rhône, un jour de grand vent, et il ne se connaissait ni père ni mère.

Mary hochait la tête.

— Il faudrait t’expliquer, petit bêta ! fit-elle d’un ton doctoral.

— Attends ! des amoureux, c’est un garçon et une fille qui se causent, ils se font des cadeaux de fleurs, ils s’embrassent et ma foi…

Siroco s’arrêta, le nez levé.

— Est-ce que ça va pleuvoir ? Ohé ! les moussues, le patron ne sera pas content, il faut fleurir et ne pas se laisser tomber comme ça !

— Ensuite ? interrogea Mary avec vivacité.

Siroco la regarda de travers.

— Ensuite, rien !

— Papa donne des bouquets à madame Corcette, mais ils ne s’embrassent pas… D’ailleurs papa n’est pas un garçon, c’est un colonel et madame Corcette, c’est une dame. Tu auras vu des amoureux dans les villages, mon pauvre Siroco, il n’y en a pas dans les salons…

— Tu crois ? dit Siroco étonné de la profonde logique de Mary.

Tout à coup, Siroco, qui était la vivacité même, et qui avait des instincts de câlinerie fort bizarres,