Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/376

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— Tu es un abruti, mon vieux ! dit le baron, s’appuyant aux hanches de sa femme.

— Pardonnez-moi, Monsieur le baron, je ne vous reconnaissais plus !

Impatientée, Mary entraîna son malade du côté du perron.

— Ah ! c’est bête !… il a dû avoir une fluxion de poitrine depuis six mois ! murmura le jardinier.

— Bah ! répondit le cocher, adressant un signe d’intelligence à la servante, qui détachait leurs malles, on a du tempérament quand on possède une jolie dame.

Mary se retourna en haut des marches.

— Je pense que vous serez sage ici, dit-elle d’un ton presque doux, et nous vous guérirons.

— Je le crois ! soupira-t-il très humble, se serrant près d’elle, craintif et allumé, l’œil vacillant comme une flamme qu’on éteint. Nous serons comme des tourtereaux ! ajouta-t-il.

Elle passa devant lui, la lèvre ridée d’un terrible rictus.

— Louis, déclara-t-elle, quand on a mené des maîtresses sous le toit conjugal (et j’ai mes témoins), on n’a plus de femme. Mon rôle se bornera à vous soigner. Rappelez-vous les ordonnances. Du reste, je suis médecin, vous savez.

— Tu es une bonne amie ! fit-il confus, mais je te supplie de ne pas me rudoyer ! Je suis plus désolé que loi de mon état. Quand la raison me revient, je me logerais des balles dans la tête. C’est une honte !