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Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/110

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monsieur vénus

Une larme, dont la clarté humide devait avoir ravi des lueurs aux Édens d’antan, coula sur la joue de Raoule. Quant à de Raittolbe, il ouvrit les bras et les agita en signe de complet désespoir.

— Elle est amoureux d’un… hom…me ! Dieux immortels ! s’exclama-t-il, prenez pitié de moi ! Je crois que ma cervelle s’écroule !

Il y eut un moment de silence ; puis, très lentement, très naturellement, Raoule lui raconta sa première entrevue avec Jacques Silvert, de quelle façon le caprice avait pris les proportions d’une passion fougueuse, et de quelle façon elle avait acheté un être qu’elle méprisait comme homme et adorait comme beauté. (Elle disait : beauté, ne pouvant pas dire : femme.)

— Un homme de ce calibre peut-il exister ? balbutia le baron abasourdi, entraîné dans une région inconnue où l’interversion semblait être le seul régime admis.

— Il existe, mon ami, et ce n’est pas même un hermaphrodite, pas même un impuissant, c’est un beau mâle de vingt et un ans, dont l’âme aux instincts féminins s’est trompée d’enveloppe.