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Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/196

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monsieur vénus

Jusqu’aux fibres les plus secrètes, le baron se sentait remué. Raoule était capable de tout, il le savait et ne doutait pas une minute qu’elle eût pu arriver à une pareille exaltation.

— C’est horrible ! horrible, murmura-t-il, nous sommes indignes de l’humanité… Que ce soit la lâcheté ou l’amour qui ait paralysé Jacques, nous ne devions pas, nous, des natures pensantes, nous laisser aller ainsi à l’emportement. Nous ne devions voir en lui qu’un être irresponsable.

Raoule ne put s’empêcher d’avoir un mouvement de rage.

— Vous viendrez, fit-elle, je le veux ! mais souvenez-vous que je vous hais et qu’à l’avenir je vous défends de le regarder comme un ami.

Le baron ne releva pas cette allusion, qui peut-être demandait une nouvelle goutte de sang.

— Votre tante est-elle instruite de ce mariage ? interrogea-t-il d’un ton plus calme.

— Non, répliqua Raoule, je compte sur vos conseils pour l’y amener ; du reste, il aura lieu… Marie Silvert l’exige.