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Page:Ramuz - Aline, 1905.djvu/81

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ornières et les épis, dépassant la masse oscillante des gerbes, tintaient à chaque choc comme du métal.

Mais Julien faisait claquer son fouet. Les filles qui moissonnaient au bord du chemin relevaient la tête pour le voir passer. Quand la pente devenait raide, il serrait la mécanique qui grinçait. Les roues enrayées soulevaient une grosse poussière pleine de l’odeur du froment. Et il pensait encore :

« À dix heures, il y a bien ceux qui sortent de l’auberge, mais aujourd’hui ils seront fatigués ; un jour de moisson, ça coupe les bras ; on sera seuls, alors tant mieux. Elle fera tout ce que je voudrai. »

À mesure que le soleil baissait, les ombres des arbres s’allongeaient, puis elles pâlirent et se confondirent dans le crépuscule qui montait du fond des vallons. Des hommes et des femmes, le râteau