Aller au contenu

Page:Revue de Paris, tome 25, 1831.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LA PRIMA DONNA.

Séparateur



Dans une des principales hôtelleries de Vérone on vit un soir un mouvement extraordinaire. Des groupes se formaient dans la salle et jusque dans la cour ; on parlait avec chaleur. Un étranger eût pu croire qu’il s’agissait d’un grand événement politique ; car pour ce peuple restreint à la passion des arts, le début d’un chanteur ou le succès d’un opéra sont d’aussi puissans motifs d’intérêt que chez nous le renvoi d’un ministre ou une déclaration de guerre.

Or il ne s’agissait rien moins à Vérone ce soir-là que de la rentrée de la signora Gina, jadis les délices de la ville, mais éloignée du théâtre durant plusieurs années. Son nom partait de toutes les bouches accompagné des épithètes de diva, de benedetta.

Un grand silence succéda aux transports. Tous les yeux se tournèrent vers un jeune homme qui venait d’entrer sans rien dire à personne, et qui s’était jeté sur une chaise demi-brisée prête à manquer sous son poids.

Il était beau, mais étrange. Près de lui, sur une table, il avait posé son manteau roulé autour d’une épée, et sa main droite était cachée dans son sein.


« Valterna ! » lui cria quelqu’un en lui frappant sur l’épaule.