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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/110

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REVUE DES DEUX MONDES.

toutes les intrigues légitimistes du moment. Il est des hommes qui sortent découragés des luttes politiques, maudissant le pays qui les repousse, se tordant les bras avec désespoir, en songeant au bien qu’ils n’ont pu faire, ou au mal qu’ils ont fait involontairement, qui expirent de douleur dans leur retraite. M. Villèle, après avoir fait tous les efforts humains pour rester au pouvoir, en est sorti le sourire sur les lèvres, et calme comme il y est entré. Ce n’est pas une de ces organisations qui périssent à la peine, et laissent leur raison dans ces combats cruels ; il s’était chargé de faire les affaires de la restauration, il les a gérées avec zèle, et en véritable intendant, n’oubliant pas en même temps de faire les siennes, et se consolant un peu de la chute de la maison de Bourbon, en songeant que la maison de Villèle n’a pas été renversée avec elle. M. Villèle n’a-t-il pas raison de mépriser les passions politiques, de quelque nature qu’elles soient, lui qui se promène paisiblement sous les beaux ombrages de Morville, tandis que Périer et Canning pourrissent dans leur tombe !

Maintenant, au moment de terminer cette lettre, je crains bien de m’être abandonné à quelques vieux restes de ces fâcheuses passions, et de n’avoir pas parlé du ministère de M. Villèle avec tout le calme et l’impassibilité que doit inspirer une époque entièrement séparée de nous par la révolution qui a éloigné sans retour tous ces hommes. C’est que, je l’avoue, la restauration représentée par Charles x, et tous les dévots personnages qui l’entraînaient à se perdre et à mentir au pays ; la restauration représentée par M. de Labourdonnaye qui voulait venger Dieu, par M. de Bonald qui disait à propos du sacrilège : « Si les bons doivent leur vie à la société comme devoir, les méchans la lui doivent pour exemple ; » cette restauration ainsi faite, je m’accoutume à la voir avec indulgence, car, toute folle et odieuse qu’elle ait été, elle exprime une religion et une croyance, deux sentimens qu’on m’a toujours appris à respecter. Mais la restauration des roués, telle qu’elle s’est formée sous le ministère de M. Villèle, flairant le vent, se pliant à tout, prenant tous les masques et toutes les robes, sans pudeur, sans morale, sans conviction, se faisant commode et facile pour plaire à ceux-ci, cruelle et furieuse pour sympathiser avec ceux-là ; ce régime et les hommes qui l’ont créé m’inspirent une