Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/494

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
490
REVUE DES DEUX MONDES.


terprétation des monumens appartenant à la haute antiquité grecque ; elles ramènent dans le champ de l’histoire positive une multitude de faits qu’on avait réussi à transporter dans une sorte de monde primitif, où les hommes dont l’imagination est vive, la science légère et le jugement peu sûr ou mal exercé, peuvent errer tout à leur aise au milieu des nuages ; elles remplacent enfin, par une méthode qui n’admet que des déductions naturelles de faits clairement établis, toutes ces interprétations arbitraires, ces suppositions gratuites, cet échafaudage d’allégories, d’emblèmes, de symboles, d’étymologies, qu’on trouve toujours à point nommé, quand on en a besoin, et dont l’élasticité parfaite permet à la main qui les emploie de les resserrer ou de les étendre à volonté.


L’ensemble de ces recherches, en me conduisant à la conséquence que les constellations de la sphère grecque sont d’invention grecque, sauf quelques emprunts partiels, et que celles du zodiaque ont la même origine, m’a confirmé dans l’idée que les Grecs doivent beaucoup moins à l’Orient et à l’Égypte qu’on ne le pense généralement de nos jours. Sans doute, les colonies asiatiques[1] qui vinrent, à des époques reculées, s’établir dans la Grèce, apportèrent le germe des premiers arts, et quelques idées ou pratiques religieuses à des peuples qui n’étaient pas civilisés comme elles. Mais, de très bonne heure, nous

    religieuses, analogues à celles que l’on connaissait déjà par le bas-relief du temple d’Hermonthis, qui est du règne de Cléopâtre, et par celui d’un des tombeaux de Thèbes. On y voit figurer, dans des rapports et avec une signification parfaitement inconnus, que chacun peut expliquer à sa guise, divers animaux, qui se trouvent partout, un lion, un bœuf, des crocodiles, un scorpion, etc. Que de pareilles scènes soient religieuses plutôt qu’astronomiques, c’est ce qui résulte de leur uniformité même, sur des monumens d’époques si différentes. Quand il serait certain que les animaux qu’on y voit, y ont été placés comme astérismes de la sphère égyptienne, ce que personne ne peut affirmer, on n’en serait pas moins sûr que ce ne sont point des figures zodiacales, puisqu’ils diffèrent essentiellement par leur pose des animaux du zodiaque des temples égyptiens. Ce ne sont pas là des représentations zodiacales. J’appelle ainsi une succession de plusieurs signes, trois ou quatre, comme le bélier, le taureau, les gémeaux, etc., ou bien encore un seul signe, mais de ceux qui n’existent que dans le zodiaque, comme le Capricorne et le Sagittaire. Or, ni Champollion, ni aucun autre, n’a rien trouvé de tel sur des monumens d’une époque antérieure à la domination grecque. Jusqu’ici, l’annonce qu’on n’en trouverait pas n’a point été démentie. (Note ajoutée.)

  1. Je ne dis pas les colonies égyptiennes, parce que je regarde celles qu’on attribue à Inachus, à Cécrops et à Danaüs, comme des inventions postérieures à l’établissement des Grecs en Égypte sous le règne de Psammitichus.

    — Ce sujet a été traité en détail dans deux leçons au Collége de France, les 7 et 14 mars 1836. (Note ajoutée.)