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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 28.djvu/385

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Aucun d’eux ne s’étend jusqu’à la plaine, ils sont en général exposés ainsi au sud-est avec quelques différences d’inclinaisons[1]. En général, ni le sommet des monts, ni les revers des coteaux n’offrent de crus renommés, pas plus que les plaines qui s’étendent au loin depuis le pied des montagnes ; celles-ci, sous un climat assez doux, ont l’avantage de se prêter à la culture des volumineux cépages, très productifs, qui donnent en abondance des vins à bas prix et cependant salubres, pourvu que la fermentation et la clarification aient été dirigées avec des précautions spéciales. En tout cas, on doit éviter ou faire disparaître autant que possible les marais et les grands arbres aux abords des vignobles. Les plus mauvaises expositions enfin se rencontrent sur les pentes en regard du nord, du nord-ouest, de l’ouest et du sud-ouest.

Presque tous les terrains calcaires, granitiques, schisteux, sableux, plus ou moins ferrugineux et magnésiens, conviennent à la vigne ; la composition spéciale de ces différens sols exerce sans doute, ainsi que les températures variées de nos climats et de nos diverses expositions, une notable influence sur la qualité des fruits et des vins. Il en résulte des arômes et bouquets différens ; mais ces variations elles-mêmes sont en somme favorables aux débouchés des vins de France, car elles augmentent les chances de satisfaire aux goûts non moins divers des consommateurs et de défier la concurrence des vins étrangers. Dans tous les cas, les travaux préparatoires destinés à l’exploitation ultérieure, comme à l’assainissement des terres pendant la longue existence du vignoble, doivent être exécutés avant la plantation du cépage. En creusant des chemins larges, on assurera l’aérage et l’égouttage du sol ainsi que la facilité des transports et la possibilité d’établir des drains aboutissant à des fossés latéraux, si des sous-sols argileux retenaient les eaux et rendaient plus imminentes et plus graves les altérations qui résultent de la coulure et des gelées[2]. On ne saurait ajourner après la plantation des

  1. Toutefois le cru des Marcs-d’Or près Dijon est presque complètement situé au nord.
  2. Les anciens connaissaient bien l’utilité de l’égouttage du sol planté en vignes comme moyen d’éviter, dans certaines localités, les effets d’une humidité surabondante : ils avaient ordinairement recours dans ces circonstances à l’usage des fossés empierrés ; quant au drainage à l’aide de tubes en poterie placés bout à bout suivant une pente légère ou parallèlement à la superficie des terrains inclinés, est-il applicable aux vignobles ? Bien des doutes dans ces derniers temps avaient été émis à cet égard : on craignait que la pénétration des racines dans les joints des tubes n’occasionnât promptement des obstructions, que l’établissement des drains ne fût trop dispendieux dans les terrains irréguliers des vignobles. M. le comte Duchâtel a démontré le premier que ces craintes étaient sans fondement ou tout au moins exagérées : il a drainé en 1852-53 près de 2 hectares de ses vignes du Médoc en creusant les fossés à 1m, 20 de profondeur et employant 800 mètres de tubes par hectare. Les effets favorables se sont produits presque aussitôt, et dès l’année suivante le drainage fut étendu, dans son domaine, à 70 hectares de vignes. Les lignes des tubes furent établies à 8 et 15 mètres d’écartement : dès lors disparurent tous les signes extérieurs et les inconvéniens d’une humidité surabondante. Cet exemple fut bientôt suivi par M. de Bryas, de 1853 à 1855, dans sa belle propriété du Taillon. Une troisième application heureuse a été faite ensuite par M. Persac de Saumur Maine-et-Loire, qui a fait coïncider les travaux préparatoires de la plantation du vignoble avec l’établissement du drainage.