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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/899

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manquent. Toutefois on peut deviner, en s’aidant des indications éparses dans le reste de l’ouvrage, que le second livre s’occupait des mystères païens, et le troisième des systèmes astrologiques. Le quatrième, continuation de celui-ci, est tout rempli de très curieux détails sur l’art des Chaldéens, devins et magiciens du temps. On voit que l’auteur s’est donné beaucoup de peine pour pénétrer le secret des jongleries dont les thaumaturges de l’époque éblouissaient leurs nombreuses dupes. Il paraît que certaines sectes s’étaient approprié ces moyens suspects d’exercer du prestige sur les âmes faibles. Parfois les explications que l’écrivain grec en donne auraient bien besoin d’être expliquées elles-mêmes ; parfois aussi on y trouve des recettes dont nos prestidigitateurs feraient peut-être leur profit. Il sait par exemple comment il faut s’y prendre pour que le foie encore palpitant d’une victime paraisse aux spectateurs empreint de lettres formant un mot fatidique. Il connaît des mélanges liquides dont il suffit de s’humecter les mains pour que l’on puisse impunément les plonger dans la poix bouillante ou manier des charbons ardens. Il prétend qu’une mixture de cire et de teinture d’orcanète posée sur de l’encens qui brûle se résout en une liqueur de sang. Il décrit et explique de véritables scènes de spiritisme, et ce qui prouve qu’il n’y a jamais rien de bien nouveau sous le soleil, c’est qu’il doit déjà combattre des exégètes complaisans qui voulaient à tout prix qu’Aratus et Moïse fussent parfaitement d’accord dans leur manière de raconter la création. C’est à partir du cinquième livre que l’auteur arrive enfin à ces hérésies qu’il a promis de démolir de telle façon qu’il n’en reste rien. Le gnosticisme et ses nombreuses variétés remplissent ce livre et les trois suivans. Au neuvième livre, il s’attaque à des doctrines moins éloignées de la sienne, mais qu’il déteste, dirait-on, plus encore, car son ton, relativement modéré jusqu’alors, devient âpre et violent. On serait tenté de croire que c’est surtout en vue de l’hérésie de Noet, de Sabellius, de Calliste, qu’il a rédigé son livre. C’est qu’il s’agit là d’une doctrine qui a triomphé longtemps sous ses yeux, dans sa propre église, malgré ses énergiques efforts : il s’agit de cette doctrine unitaire dont nous avons déjà parlé, et peut-être de secrètes blessures d’amour-propre se joignent-elles au zèle orthodoxe pour la lui rendre odieuse. C’est surtout dans ce livre que se trouvent de précieux renseignemens sur l’état intérieur de l’église chrétienne à Rome au commencement du IIIe siècle. S’il faut ajouter foi aux assertions de l’auteur, non-seulement les évêques de Rome Zéphyrin et Calliste auraient été hérétiques au premier chef, mais encore leur caractère moral aurait