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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 1.djvu/397

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proportion s’est toujours maintenue. La France a fourni à peu près le même chiffre que la Suisse et le Danemark. Le faible contingent de l’Italie s’explique lorsqu’on sait que la péninsule envoie presque tous ses émigrans, qui sont nombreux, dans l’Amérique du sud, notamment à La Plata. Il est bien entendu au reste qu’il ne s’agit ici que de New-York, car à San-Francisco les Chinois arrivent par milliers chaque année, et forment une proportion considérable des immigrans en Californie. Il n’est pas de pays, si lointain soit-il, qui ne contribue au peuplement de l’Amérique ; les listes renferment jusqu’à des Grecs, des Turcs, des Japonais, des Arabes. Le dernier rapport publié par le chef du bureau des statistiques à Washington, pour l’année économique américaine s’étendant du 1er juillet 1872 au 30 juin 1873, nous apprend que le nombre total des immigrans aux États-Unis a été pour cet exercice de 459 800, dont 149 670 Allemands, 85 500 Anglais et Écossais, 77 300 Irlandais, 14 800 Français, etc. L’année précédente, il n’y avait eu que 9 300 Français, et moins encore dans les exercices plus anciens, sauf lors de la première immigration californienne. C’est à l’issue malheureuse de la guerre de 1870 que l’émigration française, en général si paresseuse, a dû d’être ainsi ravivée.

Il est curieux de voir comment se disséminent les arrivans sur la surface des États-Unis. Un tiers environ reste à New-York, la grande métropole de l’Union, à la fois le Paris et le Londres des deux Amériques ; un quart se répartit dans les trois états essentiellement agricoles de l’ouest : l’Illinois, où est Chicago, le Wisconsin, l’Ohio, tous les trois grands producteurs de grains ; un huitième va dans la Pensylvanie, état industriel par excellence, et l’un des plus riches de l’Amérique du Nord : c’est là que sont les principales mines de houille et de fer ; le reste gagne de préférence les six états si florissans de la Nouvelle-Angleterre (le Massachusetts, où sont les plus vastes filatures, le Maine, le Rhode-Island, états maritimes, le Vermont, riche en forêts, le New-Jersey, le Connecticut, limitrophes de l’état de New-York), ou se dirige vers les autres états agricoles et peuplés de l’ouest : Michigan, Iowa, Missouri, Indiana, Minnesota. En somme, presque aucun des nouveaux arrivans ne part directement pour les lointaines solitudes du far-west, les grandes plaines entre le Missouri et les montagnes Rocheuses, c’est-à-dire pour les territoires de Colorado, Dakota, Wyoming, Nebraska ; mais plus d’un sera peut-être obligé d’aller les féconder plus tard. Il n’y a que les mormons, lesquels arrivent chaque année au nombre de 2 000 à 3 000 (2 327 en 1869), qui marchent résolûment à l’ouest, et ceux-ci sont poussés par la nécessité d’aller rejoindre leurs coreligionnaires. Autrement on ne va là que quand