Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 25.djvu/893

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

collodion ; c’est pour cette raison que la commission du passage de Vénus a donné la préférence aux plaques métalliques de Daguerre.

Une autre difficulté naît de la différence qui existe entre la rétine et une surface photographique au point de vue de l’achromatisme nécessaire à la netteté des images. On sait que l’objectif, ou ce qu’on pourrait appeler l’œil de la lunette, doit être achromatique, en d’autres termes, qu’il doit montrer les objets sans ces bandes colorées qui les enveloppent lorsqu’on les regarde au travers d’un prisme ou d’une lentille simple. On obtient ce résultat par l’association d’une lentille de verre ordinaire’(crown) et d’une lentille de cristal (flint), taillées de façon à réunir, après la réfraction, en un même foyer les principaux rayons colorés. Mais les objectifs achromatiques ordinaires ne conviennent pas à la photographie, car les rayons qui sont les plus importans pour la vision ne sont pas ceux qui produisent le plus d’effet chimique, et le « foyer chimique » ne coïncide pas avec le « foyer optique. » Il faut donc employer pour la photographie des objectifs achromatisés d’une manière spéciale. Il est vrai qu’on peut tourner la difficulté en substituant à la lunette un télescope à réflexion, car le télescope possède cet avantage que tous les rayons concourent exactement au même foyer, de sorte que l’image est rigoureusement achromatique. Quelques astronomes, comme M. Warren de La Rue, ont en effet employé de préférence des télescopes pour la photographie : par malheur, les miroirs sont trop sensibles aux changemens de température, et il en résulte des déformations qui troublent l’image ; aussi préfère-t-on aujourd’hui se servir de réfracteurs convenablement achromatisés.

L’achromatisme photographique peut s’obtenir en premier lieu, comme l’achromatisme ordinaire, par la courbure que l’on donne aux surfaces des lentilles ; les constructeurs y arrivent soit par tâtonnement, soit par des méthodes plus directes. C’est le moyen qui est le plus souvent employé, et c’est d’après ce principe qu’a été taillé l’objectif photographique de l’observatoire de Cordoba ; mais il faut alors renoncer à se servir de la lunette pour la plupart des observations ordinaires. M. Rutherfurd, qui désirait conserver son bel objectif, achromatique pour l’œil, a réussi à l’approprier à la photographie par l’adjonction temporaire d’une troisième lentille. Ce procédé, qui fait de la lunette un instrument à deux fins, a été adopté aussi par M. Langley, à l’observatoire d’Allegheny, où un réfracteur de 13 pouces est employé à l’étude de la surface du soleil. M. Langley fait tailler une lentille supplémentaire qui lui permettra de photographier les taches, qu’il s’est jusqu’à présent contenté de dessiner.