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Page:Sand - Cadio.djvu/331

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un scélérat. Je dirai la vérité, moi !… Je veux la dire !…

LOUISE. Ma tante, vous m’aviez juré…

ROXANE. Tant pis ! j’aime mieux me parjurer, j’aime mieux mourir que de rentrer dans cet affreux donjon où nous avons souffert tout ce que l’on peut souffrir. Henri, tu as deviné juste, oui, si c’est là ce que t’a dit la Korigane, elle t’a dit la pure vérité ; cette fille nous est dévouée, et elle n’est pas menteuse. On nous a humiliées, opprimées, Saint-Gueltas l’a souffert sous prétexte d’une jalousie feinte ; il nous a laissées sous la garde de madame de Roseray et de quelques bandits prêts à tout pour lui plaire. Notre vie, notre honneur même, étaient menacés. Si la Korigane te l’a caché, elle n’a pas tout dit. Donne-nous un sauf-conduit, une escorte, un moyen quelconque de gagner Vannes ou l’Angleterre. Nous ne pouvons pas nous réfugier à Quiberon, le marquis nous y reprendrait. Louise ne veut pas demander au commandant de l’escadre anglaise les moyens de fuir. Ce serait accuser ouvertement son mari et le dépouiller des honneurs qu’il ambitionne. La République seule peut nous sauver, nous nous jetons dans ses bras. Si c’est une honte pour nous, que le péché retombe sur la tête de l’indigne, qui nous y force !

SAINT-GUELTAS, sortant d’un lit breton enfoncé, dans la boiserie comme un tiroir et fermé d’une planche à jour. Merci, mademoiselle de Sauvières ! Voilà qui est bien parlé ! Votre douce voix m’a réveillé d’un profond sommeil que la peine de courir après vous m’avait rendu fort nécessaire. Je demande pardon au colonel de m’être ainsi introduit dans son logement pour m’y reposer en sûreté comme chez un ami ; j’ai eu la meilleure idée du