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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/125

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lui rends bien la pareille ; mais, toi, tu ne peux pas faire que je reste sans me déshonorer. Tu ne comprends donc pas ?… Tu es une enfant, et il est bien inutile que je t’explique des choses qui sont au-dessus de ta portée.

— Si fait, lui dis-je, il faut m’expliquer tout ; je suis en âge de tout comprendre.

— Eh bien, reprit-il, comprends donc que, si l’on me garde ici par charité, je dois supporter sans me plaindre tout ce qui m’y choque et tout ce qui m’y blesse : mademoiselle Jennie d’abord, la véritable maîtresse de la maison, avec ses airs dédaigneux et impertinents, et ensuite M. Frumence avec ses airs de pitié pour mon inaptitude aux sciences exactes. Or, je sais à quoi m’en tenir à prévient sur ces deux recommandables personnages. Mademoiselle Jennie est une intrigante qui joue le désintéressement pour que ma tante lui fasse la part plus large sur son testament, et M. Frumence est un cuistre qui a peut-être un double but : celui d’épouser la Jennie quand elle sera riche, ou bien… Mais tu ne comprendrais pas le reste, et je t’en ai assez dit.

— Non, je veux tout savoir. Il faut que je sache tout ce que tu penses.

— Eh bien, tâche de voir un peu au-dessus de ton âge, tâche de voir l’avenir. Tu as quatorze