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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/161

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leur. Bref, elle distillait l’ennui par tous ses pores. Elle l’éprouvait et elle l’inspirait.

Elle ne m’enseigna rien qui vaille et me fit perdre beaucoup de temps. Ses leçons étaient longues, mornes et diffuses. Sous un air de ponctualité austère, elle ne se souciait en aucune façon des progrès que je pouvais faire. Toute la question pour elle était de remplir mes heures et les siennes par une inutile corvée régulière. L’exactitude de ces heures suffisait à sa conscience ; n’aimant rien ni personne que je sache, elle se traînait, languissante et désenchantée, parfaitement résignée en apparence, mais protestant intérieurement contre toutes gens et toutes choses.

De tout ce qu’elle était censée m’apprendre, je n’appris rien que l’anglais. Je savais plus d’italien qu’elle. Frumence m’en avait appris la grammaire comparée avec la grammaire latine, et j’en connaissais très-bien les règles. J’étais plus portée à le bien prononcer, grâce à l’accent méridional qui résonnait sans cesse à mes oreilles, que miss Agar avec son sifflement et sa chanson britanniques incorrigibles. Elle m’enseigna les éléments de la musique ; mais, par la sécheresse de son jeu, elle me fit prendre le piano en horreur. Elle dessinait et lavait avec une audacieuse stupidité, grâce à une facture de convention qu’alla savait de