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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/254

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de Frumence, et je ne m’en consolai qu’en espérant qu’il ne s’en était jamais aperçu. Puis je me demandai ce qui fût arrivé, s’il eût été un ambitieux, un homme sans principes, ou seulement un caractère faible. Je vis devant moi l’épouvante d’une situation inavouable, des douleurs ridicules comme celles de Galathée, l’anathème du monde, le blâme de Jennie, le désespoir de ma grand’mère. Et tout cela eût pu m’arriver en dépit de l’innocence de mon âme et de la pureté de mes intentions ! Je me blâmai sévèrement, et je tâchai de me réconcilier avec moi-même en me disant que Marius me sauvait des vaines illusions : je devais lui en savoir gré.

Ma tête travaillait bien un peu sur tout cela, et, pour devenir calme, je faisais de grands efforts qui retardaient le calme. La première fois que je revis Frumence après la confession que je lui avais arrachée, je le revis avec d’autres yeux. Sa beauté physique, qui était réelle et qui m’avait toujours été indifférente, me sembla exprimer une valeur intellectuelle plus grande que je ne l’avais soupçonnée. Je me sentis irritée des regards de possession ardente que Galathée égarait sur lui. Je fus sérieuse et retenue avec lui comme jamais je ne lui avais fait l’honneur de l’être. Je l’étudiai sous le rapport de ce fameux savoir-vivre que Marius es-