Aller au contenu

Page:Sand - La Filleule.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

littérature. Mais j’avais assez lu un peu de tout pour connaître la réalité des choses et pour voir, à côté de ce charme pittoresque que l’on avait le caprice de leur prêter, le mépris trop fondé qu’ils inspirent aux nations qui les connaissent et qui souffrent de leurs rapines, de leur malpropreté, de leurs ruses, de leur abjection en un mot.

L’enfant devint donc bientôt pour moi un objet de curiosité physiologique, de pitié naturelle, et rien de plus. Quand je rentrais le soir de mes longues courses dans la forêt, je regardais sur la litière fraîche et parfumée de l’étable, le groupe de la brebis noire allaitant ses deux nourrissons, l’enfant et l’agneau. J’admirais la maternelle sollicitude de ma vieille hôtesse et la débonnaireté du père Floche, qui détestait les marmots et à qui sa femme persuadait de bercer celui-là. Ces deux vieillards, rangés, probes et austères, me paraissaient alors bien plus dignes d’attention et d’intérêt que la problématique destinée de ma filleule.


    1. from ##



IV


Ma santé de paysan avait beaucoup souffert pour s’acclimater à l’air de Paris et à la réclusion où je m’étais plu à m’oublier moi-même. Dans cette belle forêt de Fontainebleau, qui a inspiré son poëte, l’auteur d’Oberman, comme les forêts vierges de l’Amérique ont inspiré Chateaubriand et Cooper, je me sentis bientôt renaître. Mon âme resta triste, mais non oppressée, et j’éprouvai moins qu’à Paris le besoin