Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/70

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un véritable hanneton qui va donnant de la tête dans tout ce qui brille.

On servit le punch. Je m’en approchai un des derniers, et me trouvai assis près de Laura.

― Tiens, me dit-elle en m’offrant le nectar refroidi dans un beau gobelet de cristal de Bohême, bois à ma santé, et montre-toi plus enjoué. Sais-tu bien que tu as l’air de t’ennuyer, et que ta figure distraite m’empêche de m’étourdir comme je le voudrais ?

― Comment veux-tu que je sois gai, ma bonne Laura, quand je vois que tu ne l’es pas ? Tu n’aimes pas Walter ; pourquoi se presser d’épouser sans amour, quand l’amour pourrait venir pour lui… ou pour un autre ?

― Il ne m’est pas permis, répondit-elle, d’en aimer un autre, puisque c’est lui que mon père a choisi. Tu ne sais pas tout ce qui s’est passé à propos de ce mariage. On t’a jugé trop jeune pour t’en faire part ; mais, pour moi qui suis encore plus jeune que toi, tu n’es pas un enfant, et, puisque nous avons été élevés ensemble, je te dois la vérité.