Aller au contenu

Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/94

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

exécration les doctrines qui, au nom de Dieu, calomnient Dieu et combattent la liberté humaine, le développement du vrai ! Je ne fléchirai le genou dans aucun temple d’où la liberté de penser sera exclue. Je ne bénirai la main d’aucun homme ennemi de cette liberté, je n’accepterai aucun culte destructeur de la parcelle de vérité divine qui s’appelle en moi amour et justice, je ne ferai plus grâce au présent par engouement poétique pour le passé, je ne m’abandonnerai plus à ces mollesses de l’âme qui, regrettant les joies de l’imagination, les rêveries de l’enfance, abdique les austères devoirs de l’âge d’homme ; je subirai toutes les persécutions, j’accepterai l’effet de toutes les vengeances : il faut que toute initiation ait ses martyrs. Les tartufes d’aujourd’hui réclament ces gloires de l’origine chrétienne ; qu’ils nous les donnent, eux qui, se disant toujours persécutés, se sont faits persécuteurs à leur tour ! Montrons leur qu’aujourd’hui les chrétiens, c’est nous, et qu’ils sont eux, les pharisiens. Et, si leur puissante conspiration contre la liberté humaine atteint son but, s’ils parviennent, à défaut des bûchers de l’inquisition, à rétablir la torture des cœurs et des consciences, soyons prêts : je suis prêt, moi ! je les brave et les défie !

Je viens d’interrompre ma lettre pour recevoir et lire la tienne. Ah ! mon père, mon maître, mon ami, nos pensées ne se croisent pas, elles se cherchent et s’embrassent. Tu vois ! j’avais compris, et je suis toujours sous le charme de ta parole, sous le coup de ta vivifiante bénédiction. Oui, oui, je relirai cent fois tes lettres. Ne crains pas de me donner la fièvre : je brûle de vivre, l’inaction me tuerait !

À bientôt une plus long lettre, et toi, écris-moi de Paris. Adieu, je t’aime.

Henri entre chez moi et m’apprend que Lucie est de