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Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/95

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retour à Turdy. Son père, le général La Quintinie, y est arrivé inopinément hier au soir. J’irai demain.




V.


M*** À MADEMOISELLE LA QUINTINIE, AU CHÂTEAU DE TURDY.


Chambéry, 7 juin 1861.

Je m’inquiète un peu, non de cette joie que vous avez éprouvée en apprenant l’arrivée de monsieur votre père, mais de l’empressement que vous avez mis à quitter mademoiselle de Turdy le soir même. J’ai trouvé la bonne tante tout en émoi de vous savoir seule sur les chemins à dix heures du soir. Ses braves serviteurs sont bien vieux, ses vieux chevaux bien lents, et ce lac à traverser… Comment avez-vous fait, si, comme il est à craindre, votre barque ne vous attendait pas ? Vous avez dû causer au général une bien agréable surprise ; mais, comme il ne vous appelait auprès de lui que pour le lendemain matin, cette grande hâte était-elle si nécessaire ?

Ne riez pas, mademoiselle, de voir votre ami s’inquiéter des petites choses. Quand il s’agit d’une personne telle que vous, les moindres résolutions prennent de l’importance. Vous avez peut-être cru me faire pressentir vos dispositions à demi-mot, et on peut bien ne dire à son ami que la moitié d’un secret délicat. Puisque vous autorisez la franchise de ma sollicitude, aussi fervente et aussi désintéressée aujourd’hui qu’elle l’a été dans le passé, laissez-moi vous dire ce que je pense de la situation de vos esprits. Ce jeune homme dont vous m’avez parlé vous occupe plus que vous n’osez en convenir, et l’inquiétude que sa courte maladie vous a causée, n’était