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Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/354

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de tous les passants. Mais un personnage d’Hoffmann ne saurait s’arrêter à une impression si simple. Notre jeune homme s’est dit que l’on avait peut-être quelque grave motif pour ne pas réparer ou reconstruire cette maison ; qu’il se pourrait bien qu’elle ne fût pas aussi inhabitée qu’elle semble l’être ; que sans doute, si l’on cherchait, on arriverait à découvrir un étrange mystère... Une fois son esprit engagé dans ce courant de conjectures, il n’a plus été libre de penser à autre chose. Il a pris des informations ; on lui a répondu que la maison servait d’officine à un confiseur qui habite le rez-de-chaussée de l’hôtel voisin. Quelle déception ! quelle chute ! Mais le renseignement méritait-il bien toute confiance ? Le jeune homme est entré chez le confiseur et l’a fait causer. Or le bonhomme a répondu qu’en effet il avait désiré louer la maison pour y faire sa cuisine sucrée, mais qu’on avait repoussé ses propositions ; il a ajouté que, de temps à autre, l’on entendait de singuliers bruits sortir de ce logis mystérieux, qu’il s’en exhalait aussi d’étranges odeurs, et que certainement il s’y trouvait au moins deux personnes, bien qu’on n’eût jamais vu que l’une d’elles, un très vieux domestique, rude, vigoureux, ne répondant que par des monosyllabes ou des rires sardoniques aux questions qu’on lui adressait. Notre héros de roman avait donc raison. Mystère ! mystère ! Dès ce moment, le voilà cloué sur le boulevard, devant la maison, regardant incessamment la porte et les fenêtres. Il est enfin parvenu, dans un instant rapide, à entrevoir un joli bras blanc