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Page:Sand Flaubert - Correspondance (Amic Calmann-Levy 1904).djvu/10

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que, demeurée veuve, l’idée lui vint de compléter la Correspondance de George Sand, publiée par Maurice Sand, et d’y ajouter les lettres de ses correspondants, tels que Gustave Flaubert, Armand Barbès, Mazzini, le prince Napoléon, Marc Dufraisse, François Rollinat, Alexandre Dumas fils, Paul Meurice, Victor Hugo, etc., etc. L’œuvre était vaste, et elle se disait bien que ce travail ne pourrait être publié, elle vivante ; mais cette pensée ne l’arrêtait pas. Des rhumatismes rendaient parfois sa pauvre main douloureuse, elle supprimait alors toutes les lettres particulières, s’excusant par un mot auprès de ses amis ; elle réservait son temps et ses forces à « sa chère copie ». Elle travaillait silencieusement à l’insu de tous si ce n’est de ses proches ; mais, grâce à son effort persistant, les pages s’accumulaient sur les pages. J’avais l’honneur d’être son confident.

« Je ne puis pas vous dire, s’écriait-elle parfois, les joies que me cause cette correspondance. Bonne mère n’est plus morte pour moi, elle m’est rendue, je l’ai retrouvée. » Et souvent elle ajoutait avec un sourire doucement moqueur : « Le souvenir de ceux qui ne sont plus me dérobe l’égoïsme et la platitude de nos contemporains. N’admirez donc pas trop mon travail de préparation, c’est une besogne consolante à laquelle je trouve mon compte. »