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Page:Senancourt Obermann 1863.djvu/101

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bruit du monde. Tout se montre à lui, il ne saurait rien saisir : l’harmonie universelle est dans les choses extérieures, elle est dans son imagination, elle n’est plus dans son cœur ; il est séparé de l’ensemble des êtres, il n’y a plus de contact : tout existe en vain devant lui, il vit seul, il est absent dans le monde vivant.

LETTRE XXIII.

Fontainebleau, 18 octobre, II.

L’homme connaîtrait-il aussi la longue paix de l’automne, après l’inquiétude de ses fortes années ? comme le feu, après s’être hâté de consumer, dure en s’éteignant.

Longtemps avant l’équinoxe, les feuilles tombaient en quantité, cependant la forêt conserve encore beaucoup de sa verdure et toute sa beauté. Il y a plus de quarante jours, tout paraissait devoir finir avant le temps, et voici que tout subsiste par delà le terme prévu ; recevant, aux limites de la destruction, une durée prolongée, qui, sur le penchant de sa ruine, s’arrête avec beaucoup de grâce ou de sécurité, et qui, s’affaiblissant dans une douce lenteur, semble tenir à la fois et du repos de la mort qui s’offre, et du charme de la vie perdue.

LETTRE XXIV.

Fontainebleau, 28 octobre, II.

Lorsque les frimas s’éloignent, je m’en aperçois à peine : le printemps passe, et ne m’a pas attaché ; l’été passe, je ne le regrette point. Mais je me plais à marcher sur les feuilles tombées, aux derniers beaux jours, dans la forêt dépouillée.