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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/180

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MAROUSSIA

Le camp était tranquille. La lassitude du dernier combat avait éteint toute animation. Les sentinelles, dorées par les derniers rayons du soleil couchant, étaient si immobiles à leur poste qu’on les aurait prises pour des statues. Quelques militaires allaient encore et venaient, errant lentement sur les flancs de la colline ; quelques groupes silencieux, plus nombreux qu’on ne l’aurait cru, les uns assis, les autres étendus sur le sol, se distinguaient à peine des ondulations du terrain.

Quoique la soirée ne fût pas encore avancée, on percevait dans une tente la pâle lueur d’une lampe dont la lumière perçait les parois en toile. À mesure qu’on approchait, on entendait quelque bruit discret, celui d’une arme qu’on déplace, un gémissement, un rire étouffé, un lambeau de phrase.

Une sentinelle signala le vieux rapsode et sa compagne. Un petit mouvement s’opéra. Au lieu de se laisser intimider par le : « Qui vive ! » qui l’accueillait, par la vue de tous les guerriers ; au lieu de rebrousser chemin, comme beaucoup d’autres l’eussent fait à sa place, le vieillard marchait droit au camp.

C’était un vieux qui voulait tout voir, sans doute, et de très-près, qui certainement aimait les soldats, et qui probablement avait été soldat lui-même. Autrement il ne se serait pas avancé avec une telle confiance. Cette confiance produisit un bon effet. Quand on af-