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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/259

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NE JOUEZ PAS AVEC LES POIGNARDS.

russe lisait comme dans un livre sur le visage du massif ataman. Le renard jouait avec l’éléphant

Tout à coup le regard voilé de l’ataman s’éclaira comme celui de l’enfant boudeur qui découvre un jouet nouveau à ses pieds. Il venait d’apercevoir, montant l’allée qui aboutissait à la terrasse, une sorte de mendiant accompagné d’une petite fille. Ce mendiant avait un théorbe. C’était un rapsode. La distraction arrivait à point pour ce caractère apathique.

« Ces gens-là savent des chansons, dit-il en s’adressant à son surveillant, à son hôte, que je préfère à tous nos concerts. »

Il fit un signe à un Cosaque et lui donna l’ordre de laisser approcher le vieux chantre et sa petite compagne.

« Le grand ataman daignera-t-il m’entendre ? » dit le vieillard, accompagnant sa requête d’un regard tellement respectueux qu’il valait le plus humble salut.

La bonté du grand ataman alla jusqu’à montrer, de sa main blanche et potelée, la place à l’angle de la terrasse où pouvait s’asseoir le musicien.

« Là, lui dit-il d’une voix dolente, le soleil ne t’incommodera pas. »

Le seigneur russe, observateur de sa nature, remarqua que l’épaule du vieux chanteur semblait bien forte et bien robuste, et s’étonna que la chemise