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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/98

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MAROUSSIA

des coups de sabre ou des coups de fusil ? Sais-tu que partout coule le sang ? sais-tu cela ?…

— Oui, répondit Maroussia ; oui, je sais tout cela !…

— Les yeux méchants vont t’espionner ; on te fera des questions dont tous les mots seront des pièges, et si tu réponds maladroitement, si tu laisses échapper un petit geste, un petit mouvement, si tu parles, si tu rougis, si tu trembles un peu, tout sera perdu… Le sais-tu ?

— Oh ! je ne répondrai pas maladroitement, je répondrai bien : je n’ai pas peur !

— Il se peut, petite, que nous allions à la mort !

— Non, dit Maroussia, nous ne mourrons qu’après. Il faut d’abord que tu arrives à Tchiguirine. Une fois que tu seras à Tchiguirine, je mourrai, s’il le faut !… Alors je n’aurai plus peur de mourir… mais il faut qu’auparavant tu sois à Tchiguirine ! Oh oui !… »

L’envoyé ne dit rien, mais il prit la fillette dans ses bras et la serra doucement sur son cœur, en l’appelant tout bas « sa chérie. »

« Maroussia, dit-il après quelques instants de silence, nous ferons bien sûr de mauvaises rencontres ; les soldats pourront t’arrêter, t’interroger. Si l’on s’approchait de la voiture, même avec l’intention de la fouiller, tu serais calme, tu n’aurais pas l’air d’une