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ÂME BLANCHE

Et je pus mesurer l’étendue du découragement, de l’absolue et profonde désespérance de Mlle Veydt, quand elle, l’énergique et la vaillante, elle répondit à ma question, tout bas, l’œil égaré, en me serrant la main :

— Je ne sais pas, Line, ce que nous allons devenir.

Ce fut son seul moment de défaillance.


On gagnait le vestibule, pour la continuation de l’inventaire, à l’étage. Ma tante dit, soudain, en s’arrêtant devant l’escalier :

— Veuillez m’attendre ici, Messieurs. Je reviens à l’instant.

Et elle gravit de son pas naturel les quelques marches qui la séparaient de l’entresol. Parvenue là, je la vis entrer chez son père, tout droit, sans frapper, ce qui ne lui arrivait jamais. Nous étions, les huissiers et moi, immobiles devant le degré.

Combien de minutes s’écoulèrent ? Cinq, peut-être ; peut-être six ou sept. Pas davantage, à coup sûr. Et j’entendis un bruit net, sec, bref, que je ne pus définir.

Au même instant, Mlle Josine, blanche comme une hostie, mais très calme, ouvrait au large la porte du cabinet de son père, puis, formulait distinctement cette phrase, d’une voix où il y avait plus d’apaisement que de désespoir :

M. le docteur Veydt n’est plus ; il vient de se suicider.