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ÂME BLANCHE

Aussitôt, ce fut dans la maison un grand tumulte ; M. Préherbu avait envoyé un de ses clercs à la recherche d’un médecin ; un autre courait faire la déposition au commissariat de police.


Je m’étais enfuie au jardin ; j’étais sans pensée et presque sans souffle, en proie à une émotion qui me faisait claquer des dents, qui me mettait une sueur froide dans le dos. Je ne pleurais point : la mort de mon grand-père ne me causait pas, à proprement parler, de chagrin car je n’avais pour lui aucune affection véritable, je le connaissais si peu ! Mais c’est l’attitude de ma tante Josine, qui, en dépassant tout ce que j’aurais jamais pu imaginer, révolutionnait mes nerfs et mes sentiments. Qu’avait été, au juste, son rôle dans cette tragédie ? Appréciant cette femme à sa valeur, sachant l’étendue de son adoration pour M. Veydt, le culte dont elle entourait la personne et le caractère de celui-ci, je me doutais qu’elle avait dû souhaiter ardemment de le voir mort plutôt que déshonoré… Mais jusqu’où avait été son intervention pour l’accomplissement d’une telle fin ?

Je sentais là, de la part de la vieille demoiselle, une espèce d’héroïsme surhumain, mais je ne savais pas exactement si c’était de l’admiration ou bien une répugnance horrifiée que m’inspirait une fermeté si stoïque.