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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/146

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princesses de science

Une minute, Thérèse regarda l’étrangère avec attendrissement. L’effort contre son cœur, contre sa débilité naturelle, avait creusé, à la longue, un masque douloureux sur son joli visage. À la savoir si fort aimée, secrètement, par ce bon garçon de Pautel, Thérèse se réjouissait comme d’une équité miraculeuse de la vie. Elle méritait tant d’avoir sa part de bonheur, elle aussi, la pauvre petite Dina, si solitaire, si misérable, si courageuse !

— Vous faites des choses intéressantes ? demanda la jeune fille à l’interne.

— Oh ! rien d’extraordinaire ; c’est toujours ma thèse que je travaille.

Dina se préparait à passer au vestiaire pour endosser sa blouse. Thérèse la retint :

— Dites-moi, mon mari voudrait vous parler… oui, vous parler d’une colle de Boussard… C’est au sujet de votre concours… Voulez-vous déjeuner avec nous ?

— Avec vous ? répéta Dina.

— Oui… chez nous, on causera mieux.

Dina réfléchit, un instant. Jusqu’ici, les études communes, les mêmes séances à l’hôpital, la camaraderie, avaient nivelé les inégalités entre l’élégante fille du maître Herlinge et la petite étudiante russe aux jupes de pilou. À cette invitation, elle se ressaisit, se remémora sa misère, gaiement :

— Déjeuner en ville, ma chère ! y pensez-vous ? Regardez comment je suis mise. Je vais être le scandale de votre valet de chambre.