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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/214

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princesses de science

Est-ce une déchéance ?… Tu te refuses à être un instrument au service des forces de la vie, mais discute-t-on les lois de la nature ? « Il y a des lois secrètes qui dépassent notre raison, dit Artout, on ne regimbe pas contre elles à moins d’être amoral… » En vérité, je me demande quels êtres vous devenez, vous les cérébrales, les amazones nouvelles, si vous ne voulez plus être des femmes !

Elle dit lentement :

— J’étais indépendante, tranquille et joyeuse, ma volonté seule était mon guide ; je ne relevais que de moi-même ; mais j’ai consenti au servage… Ah ! je comprends maintenant madame Lancelevée !…

Puis, levant les yeux sur son mari et sentant combien elle le faisait souffrir, elle fondit en larmes de nouveau.

— Pardonne-moi, mon ami, pardonne-moi ! supplia-t-elle en lui tendant les bras. (Et il lut en elle une telle détresse qu’il s’apaisa et la plaignit enfin.) Oublie ces mots que j’ai dits : je ne regrette rien, je t’aime. Seulement, comprends-le, je souffre beaucoup de renoncer à des projets qui m’étaient si chers.

Il pardonna, repris d’une tendresse passionnée pour cette femme d’exception en laquelle se représentaient désormais pour lui deux amours. Mais il demeurait irrémédiablement triste. Traditionaliste, ayant au plus haut degré le sentiment de la famille, il pensait au ménage anormal qu’était le