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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/221

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princesses de science

— Mais, mon cher maître, vous m’accorderez bien le droit de posséder mes raisons !

— Elles ne valent rien… Êtes-vous heureuse, d’abord ?

Ce coup, porté tout droit, la surprit.

— Mais… mais oui, balbutia-elle, très heureuse !

— Non, ce n’est pas vrai.

Une inquiétude passa sur le froid visage de la doctoresse ; ses prunelles oscillèrent.

— Pourquoi dites-vous cela ?

— Parce que je connais les femmes. Vous en particulier, ma chère, avec votre nature, votre santé, votre équilibre, vous devez être pleine de besoins inassouvis… Dire qu’on ne voit ici pas un chat, pas une perruche à flatter, rien de ce qui trompe la sentimentalité des femmes seules, classiquement !…

— J’ai mon métier, je vous l’ai dit cent fois.

— Allons donc ! votre métier ! Quand vous m’opposez cet argument, je songe à ce prince affamé qu’on voit, dans une légende, attablé devant des mets d’or massif. Vous aussi vous avez faim, comme les autres, d’une tendresse substantielle, du bonheur dans l’amour. Et vous vous êtes offert, pour vous rassasier… des tomes de pathologie !… Je suis sûr qu’il y avait des trésors dans votre cœur !

— Il y a dans mon cœur ce que j’y ai mis, dit-elle fièrement.