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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/235

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princesses de science

la voyait bercer l’enfant, leur substance à tous deux, il se sentait communier avec elle : c’était la cohésion définitive de leurs chairs, le contentement absolu de tous ses besoins, la paix dans l’ordre familial.

Souvent, sur la grève, il renvoyait la nourrice ; et tous trois demeuraient devant la mer. Thérèse avait son petit sur les genoux. Guéméné ne disait rien ; un bien-être le remplissait ; le sentiment d’une propriété plus complète le leurrait quand il contemplait sa femme. C’était elle qui l’arrachait par un mot à son engourdissement béat :

— Dès mon retour à Paris, j’irai voir Boussard…

Ou bien :

— J’écrirai demain pour commander une table de gynécologie à mettre dans mon cabinet…

Ce retour à Paris devait clore la période de cette paix provisoire. Ils n’y étaient pas revenus depuis huit jours qu’une jeune femme, envoyée par Artout, vint consulter madame Guéméné. Elle souffrait d’un mal interne. De cinq ans plus âgée que la doctoresse, mère de trois enfants, élégante, riche, instruite, elle fut, devant Thérèse, confiante, soumise, déférente. En l’examinant, celle-ci tremblait un peu, perdit visiblement de son assurance, fut prise de doutes, de scrupules, pensa la renvoyer chez Artout sans avoir rien découvert. Puis elle se ressaisit, recommença l’examen, jugea le mal bénin.

— Eh bien, docteur ? demanda la malade, angoissée.