Page:Yver - Princesses de Science.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
274
princesses de science

Chose étrange, cette sorte de bonheur indigna Thérèse, au lieu de la tenter. Elle s’exagéra la vulgarité d’une telle vie, n’en voulut point comprendre l’harmonie tranquille, unie et douce. La belle abnégation qui mettait toute cette charmante Dina, si spirituelle et instruite, au service d’un homme, la révoltait.

« C’est l’abandon de toute dignité intellectuelle, un véritable suicide ! » pensa-t-elle.

Et elle quitta son amie avec une nervosité légère qui la crispa, la fit paraître froide. Retenue par une excellente intention, elle avait négligé de parler de ses succès, de sa carrière noblement remplie, de même qu’un riche, par délicatesse, tait sa fortune devant un indigent. Elle ne se doutait pas que, restée sur le perron enguirlandé de glycine, Dina la suivait des yeux avec ce regard attristé qu’on a pour les gens dont on a percé la secrète misère. Et pendant que la doctoresse, rêveuse, s’éloignait sur le boulevard Arago, en murmurant : « Pauvre Dina ! » l’heureuse jeune femme, rentrant dans sa maison pour retrouver sa fille endormie, savourait sa propre félicité en songeant tout haut : « Pauvre Thérèse ! »

Le soir, quand Guéméné rentra, sa femme ne savait comment lui annoncer sa détermination. La visite de l’après-midi l’avait définitivement éclairée. S’embourgeoiser comme Dina ? elle s’y refusait ; elle était lucide maintenant, comprenait