par quelles fibres la tenait son métier, et quelle déchéance subirait sa personnalité si elle cessait d’être médecin. Il lui semblait cependant que les silences de Fernand l’interrogeaient ; l’anxiété qu’elle voulait voir en lui la torturait. Le faire souffrir, quel supplice ! Dès qu’ils furent seuls, après le repas, elle tomba dans ses bras, brisée par la lutte.
— Mon ami chéri, murmurait-elle avec passion, pardonne-moi, pardonne-moi, je t’en conjure !
— Te pardonner ?
— L’acte que tu m’as demandé aurait requis de l’héroïsme, Fernand. Je t’assure que je me suis essayée au renoncement : je n’en suis pas capable. Ah ! je t’aime bien pourtant…
— Ma pauvre Thérèse, reprit Guéméné avec une grande douceur, je n’ai jamais entendu te martyriser. J’ai peut-être même été trop loin, l’autre jour, avec mes exigences. Essaye seulement, je t’en prie, de donner moins à ta médecine et plus à ton mari… Veux-tu ?
La condescendance si affectueuse qu’il y avait dans ces paroles inonda Thérèse de reconnaissance. Ainsi, non seulement il ne la haïssait pas pour sa résistance, mais il en venait à la comprendre, presque à l’approuver. Elle n’avait pas de mots pour le remercier ; il la sentit trembler de bonheur sur sa poitrine. Elle jura de le chérir plus que tout, de ne plus voir dans son métier qu’un passe-temps secondaire, de soigner sa maison, de rétrécir sa