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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/302

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princesses de science

Thérèse se reprenait peu à peu. Cette union libre répugnait d’autant plus à sa délicatesse qu’une personnalité plus haute la pratiquait, en donnait un troublant exemple, l’érigeait en principe, lui prêtait sa propre noblesse. Cependant contre ce raisonnement imprévu pas un argument ne lui venait.

— Si vous m’étonnez, vous savez pourtant, chère amie, que j’admets toutes les idées. La vôtre me semble un peu subversive ; mais vous êtes, vous aussi, une telle exception !

La douceur de cette jeune confrère, lui faisant si libéralement le crédit de son estime, en dépit de tout, attendrit la superbe doctoresse. Elle eut, dans sa transformation amoureuse, le premier abandon que Thérèse lui eût connu :

— Je suis heureuse ! prononça-t-elle ardemment.

Et ses yeux se mouillèrent de larmes…

Ils s’isolèrent dans l’hôtel. Boussard, illisible, enfermait dans le secret de son cœur cette passion tardive, orageuse et tendre, dont il chérissait son étrange maîtresse. Elle ne le quittait pas, noyée dans l’extase de cette révélation de l’amour. On les voyait toujours ensemble, mais tous deux, sous le même masque impénétrable, dissimulaient au public tout indice de cette fièvre intérieure qui les ravageait l’un devant l’autre. Plusieurs Parisiens, parmi les pensionnaires, les avaient reconnus et les observaient. Madame Lancelevée demeurait l’aus-