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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/325

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princesses de science

ans, il me faut ma vie, — une vie de tâtonnements, de pénibles efforts, après laquelle on dira peut-être de moi : « Ce fut un fou ! »

Elle répliqua, s’exaltant davantage :

— Les grands hommes ne sont pas des fous ; le hasard ne fait pas les grands hommes ; ils sont fils des œuvres qu’ils ont accomplies et qui les consacrent. Oh ! ne vous découragez pas, ne vous découragez pas, je vous en supplie. C’est vous, et pas un autre, qui trouverez. Vous touchez au succès ; demain vous triompherez ; ce n’est pas monsieur Boussard qui le dit, c’est moi, c’est moi.

Sa douceur se changeait en force. Elle ne savait rien ; c’était une femme simple qui se contentait de mots, sans curiosité, sans réflexions précises. Cependant ces propos, que lui suggérait sa bonté, remontèrent Guéméné plus que ne l’avaient fait la phrase et l’autorité du grand Boussard. Il buvait ses paroles, il en fut ivre. Et, la regardant soudain de ses yeux fiévreux qui plongeaient en elle, avec un soupir profond sorti de tout le douloureux passé qui dormait en lui :

— Oh ! que vous me faites du bien !

Et il ajouta :

— Quand j’aurais de nouvelles déceptions, quand je serai sur le point de tout abandonner, comme cela m’arrive si souvent, je reviendrai alimenter mon courage près de l’incomparable amie que vous êtes.

Alors elle comprit que l’altière doctoresse qu’il