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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/331

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princesses de science

Presque tous les jours, il venait maintenant, entre deux visites, chercher la collation qu’elle tenait prête. Le mois de mars arriva. Déjà l’on pouvait goûter sans lumière. La demi-obscurité venue de la cour intérieure suffisait à leur causerie, et leur intimité s’y complaisait. Guéméné, depuis peu, était retombé dans l’abattement. Il se montrait morose, irritable, déclarait ne plus croire lui-même à son vaccin, — cette « toxiline » que Boussard avait patronnée.

— Écoutez, lui dit un jour la douce femme, avec un timbre de voix extraordinaire, faites ce que je vous demande. J’y crois, moi, à votre vaccin anticancéreux, j’y crois de toute mon âme, de toutes mes forces, j’y crois comme à la lumière que je vois, comme à votre loyauté que je sens. Vous m’avez dit que le terrain des animaux ne suffit pas à vos expériences : prenez-moi, servez-vous de moi ; immunisez-moi par votre toxiline, puis, après cela, inoculez-moi le cancer ; je n’ai pas peur. Je vous donnerai ainsi la preuve de ma confiance… et aussi de mon amitié.

— Ma pauvre amie ! ma pauvre amie ! que dites-vous ?

Et il la regardait, troublé, mais elle poursuivait avec une exaltation sourde, qui la rendait toute nouvelle :

— Je vous en supplie, ne me refusez pas cela ; sans ce moyen, vous ne parviendrez jamais au succès, car il vous faut un terrain humain. Le voilà,