Aller au contenu

Page:Yver - Princesses de Science.djvu/334

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
324
princesses de science

Sans autre réflexion tout d’abord, elle ne pensait qu’à la malheureuse mère. Mais la fillette reprit :

— Oui, oui. Si monsieur Guéméné est ici, qu’il vienne tout de suite, tout de suite ; je l’emmènerai dans mon sapin.

— Non, répondit Thérèse, un peu stupéfaite de ce que son mari fût appelé préférablement à elle par madame Adeline, cette confrère qui l’estimait ; monsieur Guéméné ne rentrera que ce soir, mais je suis là, je vais vous suivre.

— Ah ! c’est que maman m’avait dit : « Ramène monsieur Guéméné, je veux qu’il voie Julien… » Elle n’avait pas parlé de vous. Sans doute qu’elle n’y avait pas songé, car vous êtes aussi bien médecin que lui… et qu’elle… Et puis, voyez-vous, elle est drôle, maman : elle trouve qu’une doctoresse, c’est assez bon pour ses clients, puisqu’elle les soigne. Mais quand il s’agit de l’un de nous, elle a tout de même plus confiance dans un homme… C’est bête, mais on est tous comme ça… Ma foi, madame, moi, je crois que vous en savez aussi long que votre mari. D’abord, je voudrais aussi être femme médecin…

Pendant ce verbiage, Thérèse, en hâte, devant la glace, avait assujetti son chapeau, repris sa trousse, son thermomètre, ses gants. La profession médicale crée, chez ceux qui l’exercent, une admirable impersonnalité en présence du mal grave. Toute sa pensée bandée vers l’enfant qu’elle allait secourir, elle sentait à peine l’injure discrète et voilée qui lui était faite. Ce fut seulement en fiacre, emportée aux