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princesses de science

côtés de cette petite fille garçonnière et délibérée, que son amour-propre s’éveilla et s’offensa. Elle courait à ce chevet où l’on avait dédaigné de l’appeler, où sa science n’était nullement requise ; et sa dignité se révoltait. L’idée lui vint de rebrousser chemin pour laisser Jeanne Adeline libre d’appeler quelque autre médecin, puisque cette singulière doctoresse n’accordait sa confiance qu’aux hommes. Mais la fillette bavardait toujours :

— Voilà : Julien avait mal à la gorge, et maman avait dit ce matin : « Je ne veux pas qu’il aille en classe aujourd’hui… » Puis, monsieur Artout lui ayant téléphoné hier pour le chloroforme à donner dans une opération, la voilà partie dès neuf heures boulevard de Courcelles. À midi, je rentre du cours supérieur où je prépare mon brevet : pas de maman, bien entendu ; pas de papa non plus. Pauvre père ! il n’avait pas raté l’apéritif… Alors on déjeune seuls, nous quatre. À une heure et demie, je retourne à l’école avec ma petite sœur Georgette ; Alfred, qui est externe, s’en va au lycée. Julien reste avec la bonne. Elle devait aller au lavoir, mais, pour qu’elle puisse surveiller le petit, maman lui avait recommandé de faire son savonnage à la lessiveuse sur le fourneau de la cuisine, sans bouger. Ah bien, oui ! voilà le savon qui manque, ou « la carbonade », je ne sais quoi ; elle court chez l’épicier, rue de l’Ancienne-Comédie : l’affaire d’une minute, à ce qu’elle dit. N’empêche que Julien a le temps de monter sur une chaise, de soulever