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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/346

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princesses de science

être un brave homme. S’il s’est égaré, la faute en est à moi. Maintenant le mal est sans remède. Revenir au foyer, m’y enfermer pour y remettre l’ordre ? c’est trop tard. Déjà, là-bas, à l’économat de la Pitié, les blâmes pleuvent sur Adeline. Indulgemment, le directeur m’a fait avertir que sa conduite était inconvenante, et portait atteinte à la dignité de l’administration. Il est en passe de perdre son emploi. Alors je suis rivée à mon métier, qui sera bientôt le seul gagne-pain de la famille. Quant à lui, le malheureux, je n’ai qu’à le laisser sombrer jusqu’au fond, à me désintéresser de lui, sans pouvoir consacrer seulement une semaine de soins et de sollicitude à un essai de sauvetage… Et si Julien meurt maintenant, n’aura-t-il pas été, lui, la seconde victime de mon métier ? Savez-vous que c’est affreux !

Elle était toute blanche. Un grand frisson la secoua ; ses yeux, si gais naguère, exprimaient un désespoir immense. Thérèse, qui avait écouté cette confession douloureuse avec un intérêt étrange, eut tellement pitié de la pauvre femme qu’elle la prit à l’épaule, l’embrassa.

— Ma bonne madame Adeline, ne perdez pas courage à ce point ! Julien n’est pas en danger de mort. La brûlure de la cuisse intéresse un peu le muscle, je le crains, mais le pouls n’est pas mauvais ; la température a peu monté. Après le bain, je lui ferai une piqûre de morphine, puis les pansements. Je vous en prie, consolez-vous. Vous avez mené la