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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/349

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princesses de science

— Je veux être médecin ; je veux signer, un jour, des ordonnances, comme vous : « Docteur Lucie Adeline… » Je veux guérir des gens, devenir célèbre comme madame Lancelevée. Si l’on m’en empêche, je me tuerai.

Ses yeux lançaient des flammes et se mouillaient de larmes. On devinait combien pouvait être vif et violent chez cette enfant le désir combattu dont elle souffrait déjà comme d’une passion mystérieuse. Thérèse se troubla, s’effraya devant la responsabilité à encourir. Fallait-il, par un acquiescement tacite, orienter cette jeune fille vers cette science fascinante qui prend maintenant les femmes, les absorbe, les asservit, les exige tout entières ? Voici qu’un doute s’emparait d’elle, la rendait craintive, timorée, au moment de hasarder ce conseil qui influencerait peut-être à jamais Lucie. Elle n’était plus si sûre qu’autrefois que le bonheur fût là pour une femme. Une incertitude angoissante fermait ses lèvres…

— Ma petite amie, dit-elle enfin, je vous remercie de votre confiance. Vous êtes gentille de m’avoir si franchement ouvert votre cœur. Mais que peut valoir mon avis auprès de celui que vous donne votre mère ? Elle a une longue pratique de la profession que vous voulez embrasser ; elle vous guidera plus sûrement que moi. Elle a payé sa sagesse par des expériences probantes et cruelles : croyez-la…

— Mais si vous aviez une fille, demanda Lucie,