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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/370

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princesses de science

à la fenêtre pour fumer ; elle le rejoignit. Plusieurs minutes s’écoulèrent sans qu’elle ouvrît les lèvres. La nuit ne venait pas encore. Dans les arbres, les pigeons roucoulaient ; les bateaux-mouches, silencieux, glissaient à fleur d’onde. On entendait seulement, de temps à autre, le bouillonnement de l’eau sous l’hélice quand l’un d’eux s’arrêtait au ponton de débarquement. Enfin Thérèse, prononça :

— Fernand, il faut nous expliquer.

— Nous expliquer, répéta-t-il nerveusement.

— Tu le sais, Fernand, notre bonheur a toujours reposé sur une entière franchise ; il faut que notre malheur ne soit pas moins entouré de lumière. Soyons courageux, mon ami ; disons-nous tout, honnêtement.

Et sa voix frémissait, car dans sa fierté outragée elle avait décidé, si Fernand lui avouait sa trahison, de ne pas demeurer à ce foyer où elle cessait d’être l’épouse exclusivement choisie et religieusement honorée. Elle avait résolu de partir, de s’effacer, de rendre à ce compagnon infidèle la liberté de son inconstance. Mais, ce qu’elle avait déterminé dans l’indignation, elle ne l’exprimait plus que dans le déchirement, le brisement de son amour.

Elle reprit :

— Je sais que tu ne m’aimes plus.

— Thérèse, ma pauvre amie !…

— Ne proteste pas. Tes yeux, tes attitudes, toute ton âme dans laquelle je sais lire, ont été plus sincères que tes mots. Oh ! rassure-toi, mon