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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/384

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princesses de science

Sa voix s’étranglait ; il ne put en dire davantage. Il pénétrait d’un coup jusqu’au fond de cette âme, un peu méconnue par lui jusqu’ici, et qu’il n’avait pas osé juger de peur d’être trop sévère. Il comprenait pour la première fois cette femme d’aujourd’hui, en qui le développement intellectuel n’a pas aboli les ressources infinies du vrai cœur féminin. Celle-ci était si simple dans son renoncement, s’y déterminant sans phrases, comme à un acte minime, qu’il ne put s’empêcher de dire :

— Votre carrière s’annonçait si belle ! Ne la regretterez-vous jamais ?

— Ah ! répliqua Thérèse, que m’importe cette carrière auprès de l’amour de Fernand !

Dans son cadre d’or pâle, avec ses jolies mains jointes, son attitude si paisible, ses yeux ardents sous la coiffure légèrement démodée, la morte semblait la regarder et lui sourire. Entre ces deux femmes, la belle et douce tantine et la fière doctoresse, entre l’ombre et la vivante, une complicité intime se faisait ; toutes deux s’unissaient dans la même docilité amoureuse, dans la noble servilité du dévouement absolu. Le veuf vit le regard de la jeune femme levé sur le portrait, et, reprenant son mot de tout à l’heure, il lui dit cette phrase, qui fut pour elle la première gloire de son sacrifice :

— Ma chère Thérèse, vous ressemblez à votre belle tantine.