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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/388

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princesses de science

Cependant une timidité l’empêchait toujours de révéler son projet à Fernand. D’ailleurs elle le voyait peu. Son laboratoire, disait-il, l’absorbait de plus en plus. Dès le repas, il partait. Leurs nuits se continuaient solitaires. Thérèse laissa traîner sur sa table la liasse des circulaires qui n’étaient pas encore envoyées. Fernand jamais plus n’entrait dans le cabinet de sa femme et ne les vit pas. Thérèse se dit enfin :

« Demain je ferai l’expédition. »

Auparavant elle voulut prévenir son père. Et comme elle redoutait, avenue Victor-Hugo, l’explication en famille, avec les questions, les commentaires, les déductions, les suppositions qu’un tel aveu comportait, elle décida de se rendre, le lendemain matin, à l’Hôtel-Dieu, pour rencontrer le docteur Herlinge dans son service.

Alors, comme au temps déjà lointain de son internat, elle s’achemina dès huit heures et demie vers l’hôpital, par la rue du Cloître, tout le long de laquelle chacun des contreforts multiples de Notre-Dame élève vers le ciel une petite cathédrale en miniature, aérienne et fuselée. Quand elle aperçut le Parvis et, derrière les arbres du trottoir, le portique de l’Hôtel-Dieu, elle frissonna comme le patient au moment d’une opération chirurgicale effrayante. C’était un grand coup de sa belle hardiesse de revoir une dernière fois cet hôpital où elle avait caressé tant de rêves, remporté ses premiers succès, et d’en faire le théâtre de son abdication.