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Théorie des fonctions analytiques/Partie II/Chapitre 09

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Gauthier-Villars (Œuvres de Lagrange. Tome IXp. 268-273).
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Seconde partie


CHAPITRE IX.

Des sphères osculatrices. Des lignes de plus grande et de moindre courbure. Propriétés de ces lignes.

44. Nous venons de voir que, parmi toutes les sphères touchantes, il ne peut y en avoir aucune qui devienne proprement osculatrice de la surface ; mais on peut toujours déterminer celle qui sera osculatrice d’une courbe quelconque tracée sur la même surface. Pour cela, il n’y aura qu’à supposer fonction de comme dans les courbes à double courbure, et prendre, dans cette hypothèse, les équations primes et secondes de l’équation de la sphère

L’équation prime sera

en regardant toujours comme fonction de et dont les deux fonctions primes sont et et ensuite comme fonction de dont est la fonction prime. On trouvera, de la même manière, cette équation seconde :

L’équation prime est déjà remplie par les deux équations primes du no 42 :

Ainsi, il ne reste qu’à satisfaire à l’équation précédente, laquelle, à cause de se réduit à celle-ci

Si donc on substitue dans cette équation la valeur de trouvée ci-dessus (numéro cité), on en pourra tirer la valeur de et l’on aura

Connaissant ainsi le rayon de la sphère osculatrice, on aura, par les formules du même numéro, les valeurs des coordonnées du centre.

45. La quantité qui entre dans les expressions précédentes dépend de la courbe qui est la projection de celle qu’on suppose tracée sur la surface. Cette courbe étant arbitraire, on peut chercher celle dans laquelle le rayon de courbure sera un maximum ou un minimum, et, pour cela, il n’y aura qu’à égaler à zéro la fonction prime de l’expression de regardée comme fonction de (no 26). Mais, pour simplifier le calcul, nous observerons que, puisque

le maximum ou minimum de relativement à répondra au maximum ou minimum de ainsi, il n’y aura qu’à prendre l’équation prime de la dernière équation ci-dessus entre et en supposant nulle la fonction prime de c’est-à-dire en ne regardant que comme variable. On aura de cette manière l’équation

qui, étant combinée avec la même équation, servira à déterminer et

Si l’on multiplie cette équation par et qu’on la retranche de l’équation dont il s’agit, on aura celle-ci, plus simple,

que l’on combinera avec la précédente.

Par l’élimination de on aura une équation en de cette forme,

en faisant, pour abréger,

et la résolution de cette équation donnera

équation du premier ordre en et puisque étant, par la nature de la surface, une fonction donnée de et les quantités seront aussi des fonctions données de et Donc l’équation primitive en et renfermera une constante arbitraire et représentera une infinité de courbes qui seront les projections des lignes de plus grande et de moindre courbure de la surface proposée.

Si l’on combine les deux équations ci-dessus de manière à faire disparaître les termes où et se trouvent ensemble, on en tirera

Donc, substituant la valeur de et faisant de plus

on aura

et de là

d’où l’on voit que les deux valeurs du radical donnent l’une le maximum et l’autre le minimum du rayon

Il y a donc, à chaque point de la surface, deux branches qui se coupent et qui répondent l’une à une ligne de plus grande et l’autre à une ligne de moindre courbure, et l’angle sous lequel elles se coupent dépend de la double valeur de la quantité qui est égale à la tangente de l’angle formé par la tangente de la courbe de projection sur le plan des et avec l’axe fixe des Or, comme la position de ce plan est arbitraire, on peut la prendre de manière qu’il coïncide avec le plan tangent de la surface ; alors la projection de la courbe se confondra avec la courbe même, et les deux valeurs de deviendront les tangentes des angles que les tangentes des deux branches de plus grande et de moindre courbure feront avec une même ligne ; par conséquent, la différence de ces angles sera l’angle cherché sous lequel ces branches se coupent ; donc, nommant et les deux valeurs de la tangente de cet angle sera, par les formules connues,

Mais il est facile de voir, par les formules du no 38, que, pour que le plan tangent d’une surface coïncide avec le plan des et il faut que les valeurs de et soient nulles. Faisant donc, dans les expressions de

on aura

ce qui donne

Ainsi la tangente de l’angle dont il s’agit sera infinie, et, par conséquent, l’angle sera droit, d’où l’on doit conclure, en général, que les lignes de plus grande et de moindre courbure d’une surface quelconque se coupent toujours à angle droit.

46. La propriété du maximum et du minimum n’est pas la seule qui caractérise ces lignes : elles sont encore distinguées par rapport à leurs développées. En effet, si l’on cherche les conditions nécessaires pour que le rayon de courbure soit partout tangent à la courbe des centres, on trouvera, par des considérations semblables à celles du no 35, appliquées aux expressions des coordonnées de cette courbe (no 42), que ces conditions se réduisent à ce que les valeurs des fonctions primes soient les mêmes, soit que la quantité soit seule variable ou que les quantités varient en même temps que Ainsi, si l’on prend les équations primes des trois équations (no 42)

d’où résultent les valeurs de il faudra que la partie due à la seule variation de soit nulle. Or il est visible que la seconde et la troisième équation rendent nulle cette partie dans l’équation prime de la première équation ; donc il suffira de prendre les équations primes des équations

en regardant et comme constantes. Ces équations seront donc, en regardant, comme ci-dessus (no 44), comme fonction de et comme fonction de et

et, si on les compare aux deux équations du numéro précédent, qui déterminent le maximum et le minimum de on voit qu’elles sont identiquement les mêmes, d’où il suit que les lignes suivant lesquelles le rayon de courbure sera tangent de la courbé des centres sont les mêmes que celles de la plus grande ou de la moindre courbure.

Mais les expressions de du no 42 donnent, en ne faisant varier que

d’où l’on tire

et par conséquent

d’où l’on conclura (no 37) que la quantité sera égale à l’arc de la courbe dont sont les coordonnées. Ainsi cette courbe sera la véritable développée des lignes de plus grande et de moindre courbure, et réciproquement il n’y aura, sur une surface quelconque, que ces lignes qui puissent avoir une développée formée par les rayons de courbure.

Ces propriétés des surfaces sont très-curieuses et méritent toute l’attention des géomètres ; elles donnent lieu surtout à des applications importantes pour les arts. Voir les Mémoires de Berlin pour l’année 1760, les Tomes IX et X des Mémoires présentés à l’Académie des Sciences, et l’Application de l’Analyse à la Géométrie, par M. Monge.

Au reste, pour traduire ces formules en Calcul différentiel, il n’y aura qu’à changer en et en


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