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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/236

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

quelques mois un des eunuques cubiculaires, Aétios, avait pris rang parmi les logothètes. C’était un homme d’une logique rude et audacieuse, prompt aux décisions et aux actes. Optimiste, il annonça que jamais le règne de l’Esprit n’avait eu meilleure chance de s’établir à perpétuité sur le monde. Inutilement le vieil Eutychès, branlant de la tête, tapant les dalles de sa canne vernie, ramenant sa capuce rouge sur ses rides innombrables, exposait les périls d’un coup d’état, dans un pays où s’apaisaient lentement les agitations de l’ère iconoclaste. Irène aimait Aétios pour cette énergie qu’il montrait, jeune et vigoureux, imberbe, sec, pareil à une svelte paysanne de Sicile, et comme elle, adorné d’une lourde chevelure noire, toujours pressé, nerveux, fécond en éloquences diverses. Il arpentait les galeries et les cours du Palais Sacré, tête nue, en simarre de soie noire bordée d’un large galon vert, en souliers d’argent. Les phalères dansaient sur sa poitrine au bout de leurs chaînes d’or ; et leur bruit le précédait au loin. Eutychès trop vénérable, Pharès trop avili par des besognes louches, Jean trop ergoteur, Staurakios trop dédaigneux des contradictions furent, un temps, effacés par cette sorte d’ange robuste aux paroles claires et franches. Irène disait de lui qu’il avait toujours l’air d’annoncer à la Panagia la descente du Paraclet, la naissance du Iésous, tant il admirait d’enthousiasme ses propres discours. Ce fut ce personnage qui détermina la souveraine à réclamer des troupes la prestation du nouveau serment. Elles promettraient de ne pas