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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/464

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

trueux, brandissant les croix d’argent et d’or, les statues des séraphins à bout de hampes écarlates. Dans les cours, sur les terrasses, évoluaient les bandes de la garde en uniformes coruscants sous les chenilles et les crinières des casques. Les simandres de la Sainte Sagesse frémissaient longuement aux coups des maillets. Les rumeurs de l’Hippodrome naissaient, grandissaient, décroissaient continûment, selon les péripéties des courses. Interminables et reptiliens les cortèges défilaient en bel ordre, s’étageaient sur les marches des escaliers géants, luisaient au soleil, s’éteignaient dans l’ombre, pénétraient les polygones des édifices à coupoles bleues, les remplissaient de leurs salutations hiérarchiques, de leurs présentations cérémonielles, de leurs éloquences grammaticales. Les hérauts sonnaient dans leurs cors d’ivoire. Les scribes couvraient d’écriture les parchemins. Les serviteurs emportaient des plateaux et des cratères. Les esclaves se baissaient en courant sous le poids des amphores roses et fauves. Les nègres balançaient les litières au rythme de leur marche souple. Les sécateurs des jardiniers cliquetaient en taillant les buissons selon la forme de tétraèdres, de pyramides, de cônes, de cubes, d’animaux véritables et fabuleux, paons et crocodiles, dragons et hydres ; comme si l’horticulteur magicien se plaisait à travestir le règne végétal en bêtes orgueilleuses ou hargneuses, et à l’armer de becs, de gueules, d’ailes, de griffes. Car Byzance tout entière, en dépit de ses opinions diverses, s’évertuait pour