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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Vraie Croix, par toute la vertu divine, que tu ne dissimuleras rien des richesses impériales. Aussitôt j’aviserai pour qu’on te rende publiquement les honneurs ; et j’assurerai ta quiétude, dans l’avenir.

Irène s’étonna qu’ils ne discutassent pas ses revendications. Elle se demanda s’ils étaient résolus à violer leurs promesses dès qu’ils posséderaient, avec l’or, la sécurité. Néanmoins elle se leva, quand on eut apporté la relique suprême, se signa, tendit les mains.

— Par les bois vénérables et vivifiants de la Croix, je ne cèlerai même pas une obole !

Alors elle dit que Jean Bythométrès n’ignorait aucun secret d’Éleuthérion, et qu’il saurait les mettre en possession du trésor isaurien. Les sénateurs l’envoyèrent quérir dans le palais de Sisinnidos où il était captif. Ils ne permirent pas qu’elle lui donnât l’ordre hors de leur présence, Nicéphore étant allé recevoir dans Chalcé les délégations du port.

Blême, faible, appuyé sur un bâton blanc, l’eunuque arriva entre ses gardiens. Irène et lui se contemplèrent désespérément lorsqu’elle lui confirma l’ordre de livrer leurs richesses aux principaux du Sénat. Il ne répondit qu’en se prosternant. Ce silence signifia leur regret aussi d’avoir sacrifié leur amour d’Athènes pour une telle fin ignominieuse. Elle le bénit en fermant les yeux. Elle ne souhaitait pas le voir, informe et vieilli, se rappeler leur jeunesse héroïque, leurs jours de science passionnée au bord de la fontaine où le typhon crachait une eau tordue.